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Kosovo: un Etat mafieux au coeur de l'Europe.

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Kosovo: Un Etat mafieux au cœur de l’Europe.

 

En ce centenaire de l’attentat de Sarajevo, dont la commémoration et le souvenir  ont été l’objet de protestations de la part  des Serbes de Bosnie([1] ), au vu des projets d’intégration européenne en cours dans les Balkans(Croatie le 1er juillet([2]) et perspectives pour la Serbie par le dépôt de candidature d’adhésion en décembre 2012([3])), force est de constater que les plaies de la guerre du Kosovo sont loin d’être refermées. La candidature de la Serbie n’est pas sans poser un certain nombre de problématiques que la délégation serbe  n’hésitera pas à mettre en avant. Ce qui constitue le principal point d’achoppement pour les Serbes à leur candidature, c’est le soutien discret  de certains pays de l’UE à l’UCK (Ushtria Çlirimtare e Kosovës, Armée de Libération du Kosovo, NDLR). Cette dernière a imposé au monde l’indépendance contestée du Kosovo, entre 1999 et 2008, actuellement reconnue par la majorité des pays membres de l’UE (23 pays). Parallèlement à cette indépendance, l’UCK, par ses relations avec les services secrets albanais et par le fait que de nombreux criminels albanais et kosovars albanais, s’est transformée en une organisation mafieuse. Elle a fait du Kosovo une plaque tournante de divers trafics (drogue, armes, êtres humains et organes). Ainsi, par sa position géographique et sa situation politique instable (corruption, pressions politiques, assassinats), le Kosovo est particulièrement inquiétant pour l’Europe en construction, au plan géopolitique. Cette situation pourrait peut-être dégénérer en conflit majeur. En effet, les autorités civiles et militaires de Serbie ont procédé à la construction de la base militaire Jug, achevée en 2009([4]), tandis que l’armée serbe poursuit un programme de restructuration et de modernisation de sa brigade spéciale(Specijalna Brigada), créée en 2006([5]).

 

Aux  origines de la guerre du Kosovo: une histoire émaillée par les revendications et les affrontements nationalistes.

 

Pour bien comprendre comment la guerre du Kosovo a débuté et s’est soldée par l’indépendance de la région et pourquoi cette région a fait sécession de la Serbie, il est nécessaire de revenir sur un certain nombre d’évènements qui ont marqué les consciences nationales serbes et albanaises :

-le premier  et le plus marquant d’entre eux est le célèbre épisode de la bataille de Kosovo Polje qui se déroula le 15 juin 1389. Elle est considérée comme la bataille la plus importante de l’histoire serbe et de l’Europe médiévale. En effet, c’est à partir de cette bataille que l’Europe centrale et orientale sont tombées pour 500 ans sous la coupe des Ottomans. Cette bataille est particulièrement importante pour les Serbes d’un point de vue symbolique et identitaire. Elle est à l’origine de toute une mythologie  qui fait du Kosovo le foyer culturel et religieux  du peuple serbe, notamment par le sang versé qui ferait fleurir des pivoines, une plante rare au Kosovo. Elle ensuite a été magnifiée par la poésie et la littérature serbo-monténégrine du milieu du XIXème siècle, notamment et par Vuk Stefanovic Karadzic( ) et Petar II Petrovic-Njegos. Ce dernier, dans ses œuvres comme « la Couronne des Montagnes(Gorski Vijenac en serbo-croate) » met en avant un certain nombre de personnages notamment le prince Lazare Hrebljanovic, leader de la coalition chrétienne. Menant les forces chrétiennes, il est resté comme le symbole de la résistance face aux Turcs. Il remporta la bataille de la Maritza face à Mourad Ier et  fut  déclaré saint martyr de l’Eglise orthodoxe serbe. Enfin,  cette guerre est à l’origine de la fête nationale serbe, Vidovdan, qui est célébrée le 28 juin(15 juin dans le calendrier julien)(Voir article détaillé sur Vidovdan, Section Traditions et Cultures)([6]).

-Il faut aussi citer la fondation de la Ligue de Prizren qui fut créé le 10 juin 1878 par Abdyl  Bey Frashëri, suite au traité de San Stefano qui partage les terres albanaises entre la Serbie, la Bulgarie et la Grèce et maintient les Albanais sous la coupe des Ottomans. Elle se fixa pour but la réunification de toutes les terres albanaises dans un seul Etat albanais. Bien qu’elle remporta de nombreux succès militaires, elle fut vaincue par les grandes puissances et les Ottomans mais son héritage politique a été particulièrement fécond puisqu’ elle à l’origine des revendications nationalistes albanaises et plus particulièrement sur le Kosovo d’abord par le choix de la ville où fut créé la Ligue( Prizren est au sud du Kosovo à proximité de la frontière albanaise)([7]).

-les guerres balkaniques  notamment la Deuxième Guerre Balkanique ont eu un rôle significatif dans l’histoire du Kosovo puisque le 7décembre 1912 à la suite de la conférence des ambassadeurs, suite à la pression française, octroi le Kosovo et la Macédoine au royaume de Serbie qui est le plus grand bénéficiaire de ces deux conflits([8]). De plus, ces deux guerres ont durablement marquées l’histoire des Balkans car elles sont à l’origine des  positions politiques de la Serbie et de la Bulgarie avant la Première Guerre Mondiale et leurs conséquences sont encore d’actualité par rapport au tracé des frontières de la Macédoine qui est toujours le fruit du contentieux territorial entre la Grèce et la Bulgarie par rapport à la Macédoine(ARYM)([9]).

Suite à la Première guerre mondiale, le royaume des Serbes Croates et Slovènes (Srpsko Hrvatska Slovenska)  crée le 1er décembre 1918 et ensuite le royaume de Yougoslavie à partir de 1929, début du règne personnel d’Alexandre Ier Karageorgevic et du durcissement du régime, est régi par le régime des banovinas, une ancienne division territoriale qui correspond  en gros à la préfecture française. Dans ce cadre, le Kosovo est conquis par l’armée serbe et incorporé au sein du nouveau royaume alors que les tensions nationalistes s’amplifient en Croatie avec la radicalisation d’une partie des nationalistes croates qui donnent naissance au mouvement oustachi tandis qu’en Macédoine, les Komitadjis, la branche armée de l’Organisation de Résistance Intérieure Macédonienne(ORIM) s’organisent et déclenchent plusieurs révoltes et fomentent des complots et des assassinats([10]) .Au Kosovo, la résistance albanaise des Kaçaks, est écrasée et la Serbie  poursuit une politique de « désalbanisation » en encourageant les Albanais à partir tandis que des familles serbes et monténégrines sont installées( Vaso Cubrilovic est l’inspirateur de cette politique) juste avant le Début de la Seconde Guerre Mondiale.

Entretemps, le roi Aleksandar Ier Karageorgevic  est assassiné en 1934 à Marseille par Vlado Tchernozemski (né Velicko Dimitrov Kerin), un tueur bulgare de l’ORIM à la solde des Oustachis croates([11]). Le prince héritier Pierre II de Yougoslavie étant mineur à l’époque, c’est son oncle le  prince  Paul de Yougoslavie, cadet de Aleksandar qui devint régent sous le nom de Paul Ier. Il s’aligne sur la politique de l’Allemagne nazie et de l’Italie. Mais la signature du traité d’alliance donnent lieu à des manifestations populaires dans Belgrade, les yougoslaves étant à l’époque pour un rapprochement avec les Alliés. De plus, le général Dusan Simovic fomente un coup d’Etat , prend le pouvoir, dépose le régent, installe Pierre II de Yougoslavie sur le trône. En représailles, Hitler déclenche l’opération Châtiment  le 6 avril 1941 qui marque le début de la Seconde Guerre Mondiale dans les Balkans.

 

-La Seconde Guerre mondiale au Kosovo(1941-1945) : Elle commence véritablement  quand les Italiens annexent le Kosovo, la Métochie( partie occidentale du Kosovo peuplée en majorité de Serbes) et une partie du Monténégro à partir de 1941. Dès lors, la résistance aux envahisseurs italiens et allemands s’organise autour de deux formations politico-militaires : l’Armée Yougoslave de la Nation, autrement dit les Tchetniks royalistes du général Draza Mihailovic, jusqu’en 1943, où il est lâché par les services secrets britanniques, car une partie des Tchetniks serbes a soutenu le gouvernement collaborationniste de Milan Nedic( ). Les Anglais préfèrent soutenir les Partisans de Josip Broz  Tito, d’un point de vue stratégique et politique. Ils deviennent la principale force de résistance, car non confessionnelle et regroupant des tendances politiques différentes( [12]). Ce mouvement accentue ces actions contre l’occupant nazi qui s’est rendu maître de la Yougoslavie, notamment du Kosovo,  avec  le soutien  de la Seconde Ligue de Prizren, fondée le 5 novembre 1943. Cette ligue milite ouvertement pour le rattachement du Kosovo à l’Albanie, afin de former une Grande Albanie([13] ). Les militants de ce mouvement participent directement aux combats contre la résistance yougoslave,  en intégrant la tristement célèbre « 21ème division de montagne SS Skanderberg ». Elle se fait connaître par ses exactions et ses atrocités, notamment par le massacre de Velika  où 800 personnes trouvent la mort dans le village même et 673 autres dans les villages  environnants ( ),tandis que les Partisans accentuent leurs actions au Kosovo. C’ est la deuxième unité musulmane de ce type à avoir été créée dans les Balkans par les SS, la première étant la « 13ème division de montagne SS Handschar », à recrutement musulman bosniaque, qui sera bénie par le célèbre Grand Mufti de Jérusalem, Hadj Amin Al Husseini([14] ). Il faut préciser que ces unités étaient constitués d’individus  volontaires, ce qui n’engage pas les peuples , dont ils étaient originaires, qui pour la plupart sont restés spectateurs impuissants ou ont combattu chez les Partisans. En 1944, les Allemands déclenchent l’opération « Rösselsprung » (saut du cavalier), visant à capturer Tito et les responsables du mouvement des Partisans. Celle-ci se solde par un échec allemand  et sera la dernière grande opération militaire allemande dans les Balkans. Les Partisans ont réussi à repousser les Allemands et à libérer la Yougoslavie et Belgrade, sans le concours de l’Armée rouge soviétique. En 1945, Tito abolit officiellement la monarchie et instaure la République fédérative populaire de Yougoslavie  dont il est également maréchal, depuis le 29 novembre 1943( [15]).

Cette période a été particulièrement traumatisante pour tous les peuples de Yougoslavie et la politique de mémoire du régime communiste yougoslave n’a malheureusement rien arrangé. En effet, cette période de l’histoire à été passée sous silence, afin de conserver l’unité de la Yougoslavie. Certains hommes politiques yougoslaves  n’hésiteront pas à l’utiliser à des fins politiques, notamment Franjo Tudjman (1er président de La Croatie Indépendante)  dans ses livres, « Les Horreurs de la guerre » et « la Déroute de la vérité historique ». Il y conteste les chiffres du Centre Elie Wiesel relatifs aux victimes du camp de Jasenovac. Ses livres sont remplis de considérations antisémites, afin de se ménager les sympathies nationalistes croates, ce qui explique partiellement les violences extrêmes et les atrocités auxquelles se sont livrées les différentes factions  durant les trois conflits en ex-Yougoslavie(Guerre de Croatie, Guerre de Bosnie-Herzégovine ,Guerre du Kosovo). Encore actuellement, pour le camp de concentration de Jasenovac, tout un cérémonial a depuis été mis en place, afin d’évacuer  cet héritage dérangeant et encombrant([16])

Le Kosovo dans la République Fédérative populaire de Yougoslavie (1945-1989) : Dans la Yougoslavie communiste, le Kosovo occupe une place particulière, puisqu’ en 1945, il acquiert son autonomie formelle, à l‘instar de la Voïvodine. Celle-ci n’est effective qu’après la rupture soviéto-yougoslave en 1948 et la fermeture des frontières entre la Yougoslavie et l’Albanie communiste d’Enver Hoxha, stalinien convaincu. En 1968, Tito autorise la création de l’Université de Pristina, afin de donner à l’autonomie kosovare  une réalité plus concrète. En 1974, dans le cadre des décisions fédérales yougoslaves, la  Serbie perd tout droit de regard sur les affaires kosovares. Ceci déclenche un tollé particulièrement après l’adoption de l’impôt fédéral spécial « Kosovo», afin de financer le développement économique de la région. Certains Serbes se plaignent de cet état de fait, affirmant que les droits des Serbes du Kosovo se trouvent menacés et que cette décision lèse la Serbie. Certains Albanais réclament plus de liberté et veulent une république du Kosovo à part entière au sein de la Yougoslavie. En 1980, la mort de Tito signe la fin du rêve yougoslave, puisque, quelques années après,  les revendications nationalistes enflent dans les six républiques yougoslaves : Slovénie, Croatie, Bosnie-Herzégovine, Serbie, Monténégro, Macédoine(ARYM).  Elles culminent avec les manifestations des Albanais du Kosovo, en 1981, qui réclament que le Kosovo devienne une République. Elles  tournent à l’émeute et font des dizaines de morts dans les rangs albanais. En 1986, les revendications nationalistes franchissent une nouvelle étape, avec la publication du mémorandum de l’Académie des Sciences de Serbie qui dénonce l’ordre constitutionnel yougoslave comme étant antiserbe([17]). En 1989, Slobodan Milosevic, devenu le bras droit du secrétaire général de la Ligue des Communistes de Yougoslavie, planifie deux coups de force , la Révolution des Yaourts en Voïvodine, en 1988, et la Révolution antibureaucratique au Monténégro en 1989. Elles  lui permettent de rallier à la Serbie ces deux régions. En mars 1989, il annule l’autonomie constitutionnelle du Kosovo, créant un précédent juridique, qui débouche sur les déclarations d’indépendances unilatérales de la Croatie et de la Slovénie en 1991. Ces dernières  conduiront aux guerres en ex-Yougoslavie :

- la Guerre des Dix Jours qui voit s’affronter les éléments slovènes et serbes de l’armée fédérale yougoslave (JNA Jugoslovenska Narodna Armija) et se solde par l’indépendance pleine et entière de la Slovénie. Ce conflit a d’ailleurs été exagéré par les médias internationaux. Son traitement a été des plus partisans, notamment en France ;

-  la Guerre en Croatie où les forces armées croates ont reçu le soutien direct des Etats-Unis et de l’Allemagne, particulièrement durant l’opération Oluja(Tempête)en août 1994, où des membres de la société militaire privée américaine MPRI ont joué le rôle d’instructeur, encore une preuve de l’implication des Etats-Unis dans les conflits balkaniques  ([18]) ;

- la Guerre de Bosnie a, elle aussi,  fait l’objet d’un traitement des plus partisans, notamment par  Bernard Henri-Lévy dans son film « Bosna ». Il y traite de manière partielle et partiale du siège de Sarajevo qu’il voit au travers des yeux des soldats de l’armée bosniaque. Il oublie de mentionner les soutiens de la Bosnie-Herzégovine naissante. Faut-il rappeler que la Bosnie-Herzégovine a reçu le soutien de l’Arabie Saoudite et du Pakistan dans les années 90, suspectés d’être des soutiens du terrorisme islamiste international, et  que ces pays ont envoyé des armements lourds, notamment des missiles HJ8 Red Arrow chinois, fabriqués sous licence au Pakistan([19]). N’oublions pas les imams djihadistes de la 7ème Brigade musulmane de l’Armée Bosniaque qui ont été formés par les services saoudiens  et ont contribué à la radicalisation du gang de Roubaix([20]). De plus, est- il besoin de préciser que l’ISI( les services secrets pakistanais)  par le biais de ses officiers de liaison( notamment le colonel Sultan Amir Tarar alias Colonel Imam, formé à Fort Bragg au JFK  Special Warfare Center and School) , a participé à la formation des talibans afghans sous l’égide de la CIA et a joué un rôle actif durant la guerre de Bosnie([21]) .

Jusqu’en 1999, la guerre du Kosovo est préparée dans cette ambiance de manipulation des médias et de l’information, notamment de la part d’une grande partie de la presse française de gauche et des journaux de langue anglo-saxonne, comme le révèle Pierre Péan dans son ouvrage  «  Kosovo, une guerre « juste »pour un Etat mafieux ». En effet, il révèle  que dès le début de la dislocation de la Yougoslavie, la désinformation et la déformation des faits sont devenues un instrument  aidant à justifier l’intervention européenne, et ensuite américaine, dans les Balkans, particulièrement en Bosnie et au Kosovo. A titre d’exemple,  « Le Monde » a servi de tribune à Alain Finkelkraut qui, en janvier 1993, rappelait « qu’au lendemain de la capitulation nazie, l’Europe s’était engagée dans la construction d’une fédération d’Etats pour éviter l’instauration du despotisme et le retour de la guerre ». Et d’ajouter que c’est ce modèle que la Croatie avait « essayé d’opposer à la brutale mainmise de la Serbie sur la fédération yougoslave », tout en suggérant que les Serbes se comportaient  comme les nazis durant la Seconde Guerre Mondiale et que les différences de situations entre Sarajevo et Buchenwald  «  n’excusent rien, car  Buchenwald n’est pas seulement un lieu de mémoire, c’est une injonction »([22]). Il omet de préciser volontairement ou non, que ce sont les Oustachis croates qui ont ouvert des camps d’extermination (14 camps pour les plus grands)([23])  durant  la Seconde Guerre Mondiale, en particulier le camp de Jasenovac évoqué plus haut, et que les victimes étaient principalement juives et serbes. Il faut citer la campagne d’affichage de Médecins du Monde, lancée entre janvier et février  1993, au moment où la guerre de Croatie atteint son paroxysme, après la découverte du centre de détention d’Omarska. Cette campagne montre Milosevic aux côtés d’Hitler, sur fond de barbelés suggérant un camp de la mort et avec la phrase suivante : «Un camp où l’on purifie les ethnies, ça ne vous rappelle rien ? »([24]). De plus, cette campagne a été orchestrée par une agence de relations  publiques américaine Ruder Finn, dirigée par James Harff. Il  explique, dans une interview au journaliste Jacques Merlino,  qu’il a monté de toutes pièces l’opération « camps d’extermination », qu’il a répandu de fausses nouvelles émanant de dirigeants croates et musulmans  bosniaques ([25])

L’Opération Force Alliée (1999-2001) et l’intervention de la MINUK(2001-2008) : une opération au service du nouvel impérialisme américain et une chape de plomb sur les véritables responsabilités.

Parallèlement aux campagnes médiatiques manipulées et aux avis des « experts », plus ou moins sérieux voire même autoproclamés, à l’instar de Bernard Henri-Lévy avec la diffusion de son film Bosna, alors qu’il n’a jamais étudié l’histoire des Balkans et de la Yougoslavie. Tout au moins l’aurait-il fait dans le but de briller, comme le souligne le témoignage de Jean-Luc Marion, un de ses condisciples  à l’Ecole Normale supérieure : « Bernard a toujours été BHL. Je l'ai vu vraiment pour la première fois quand il a intégré l'École normale supérieure, un an après moi, en 1968. Évidemment, il travaillait beaucoup, avec beaucoup d'efficacité et de talent. Sinon, comment a-t-il intégré dès son premier essai ? Mais il ne travaillait pas d'abord ni surtout pour accomplir ses devoirs vis-à-vis de l'institution universitaire. Il avait son propre programme, depuis le début : publier, faire savoir des choses tragiques et, à l'occasion, se faire connaître. [...] Bernard avait tout pour devenir un professeur d'université. Il ne lui manquait que l'envie. Mais la sienne le portait vers Camus ou Malraux plutôt que vers Merleau-Ponty ou Husserl. »([26])

Parallèlement, les politiques s’empressent de pousser à la guerre  par deux éléments :

- la découverte du massacre de Raçak, un village au sud-ouest de Pristina par le chef de la mission de vérification de l’OSCE, William Walker qui s’avère avoir été un des acteurs des guerres en Amérique Latine, notamment au Salvador où en tant que chargé des relations avec l’Amérique Latine, il aurait couvert les exactions du sinistre bataillon Atlacatl à partir de fin 1989([27]). Or, les médias « oublient » de préciser ce fait des plus révélateurs, tout comme les faits troublants entourant les morts qui auraient été tués au cours d’un affrontement avec la police serbe dans les bois entourant Raçak et le fait que la police serbe, fasse de la publicité sur cette affaire, alors qu’elle cherche plutôt la discrétion. De plus,les observations des médecins légistes finlandais envoyés par l’UE  n’ont pas été en mesure d’établir  si les victimes « étaient originaires de Raçak » et que rien n’a été « clairement établi ».Ils dressent «  une liste lugubre du nombre d’impacts de balles repérés sur les corps » et ajoutent qu’ils « n’ont pas trouvé de traces de poudre » qui auraient pu attester d’une exécution , ce qui accrédite la thèse de la mort au combat. Autre fait troublant, la non publication des résultats de l’enquête des légistes finlandais, révélée par le Berliner Zeitung. Cette non publication est une preuve de plus que ce « massacre » s’inscrit dans une logique de provocation, voulue par l’UCK et les services de renseignements occidentaux, dans le cadre d’une stratégie de tension visant à faire attribuer aux Serbes, des crimes commis par l’UCK. Citons pour exemple le fameux plan de l’Opération « Fer à cheval » qui visait un nettoyage ethnique du Kosovo par l’armée serbe, alors qu’il a été concocté par le BND([28]) , le service de renseignements allemand(dirigé entre 1979 et 1982 par Klaus Kinkel qui a participé à la création des réseaux oustachis durant la Guerre de Croatie)([29]).Ces opérations préfigurent aussi les méthodes mises en place pour justifier la guerre en Irak comme le démontre le président de Serbie Milan Milutinovic([30]).De plus, les rapports d’enquête de la mission espagnole de la KFOR ont publié des résultats bien différents de ceux annoncés par les institutions américaines. Le rapport de l’OSCE d’octobre 1998-Juin 1999  mentionne que « les atteintes aux droits de l’homme et aux lois régissant le droit humanitaire n’ont pas été ,dans la période observée , le fait d’un seul camp » . Il établit que «  les tueries sommaires sont devenues un phénomène généralisé  dans tout le Kosovo, après le début de la campagne aérienne de l’OTAN contre la République Fédérale de Yougoslavie ( nuit du 25 au 26 mars 1999)([31])

-le rajout début mars 1999 de l’annexe B aux accords de Rambouillet qui se révèle être une véritable provocation de la part des Américains ([32]). De plus, durant cet épisode, Hashim Thaci et Xhavit Haliti sont reçus par la délégation américaine, conduite par Madeleine Albright, confirmant les orientations géopolitiques de Washington, alors qu’Ibrahim Rugova (opposant pacifiste et démocratique albanais, chef de file du LDK, opposé à l’UCK) représentait encore à l’époque une solution moins radicale et plus légaliste. Ces deux faits majeurs conduiront aux bombardements massifs contre la Serbie qui ont d’ailleurs eu un effet très limité sur l’intervention de l’armée serbe au Kosovo. Ils  ont visé volontairement des objectifs civils, ce qui relève du crime de guerre ,outre le fait que cette guerre est illégale ([33]).

Pendant l’opération « Force Alliée », après l’accord de cessez-le feu, signé le 2 juin 1999 à Kumanovo en Macédoine,  et après la signature d’un accord militaro-technique le 9 juin par l’OTAN et la Yougoslavie, les forces de l’OTAN  ont directement soutenu l’UCK. C’est le cas pour les forces anglo-saxonnes,  comme en témoigne le général Milos Dojsan(commandant la brigade antiaérienne  de la JNA stationné au Kosovo) qui raconte qu’en septembre 1998,  «  lui et ses officiers ont  vu des hélicoptères , venant d’Albanie, et débarquer de nuit des armes et des instructeurs destinés aux rebelles de l’UCK, près du village de Svrke, tout en observant les miliciens de l’UCK se préparant à l’offensive ». Il a rapporté ces faits aux vérificateurs de l’OSCE, notamment le colonel John Calvin Pemberton, sans réponse de sa part([34]). Citons aussi  le colonel Jacques Hogard, chef de l’opération « Trident »,  dont les dires montrent la partialité des forces anglo-saxonnes, sous le commandement du général James Mason, durant l’opération de la KFOR  notamment  à Mitrovica où les Britanniques  de la 4ème brigade blindée accompagnaient des combattants de l’UCK.  S’ensuivit une échauffourée entre Français et Britanniques au barrage de Mitovica établi quelques minutes plus tôt par le colonel Hogard ([35]). Par ailleurs, ce dernier décrit avec détails la sauvagerie des membres de l’UCK et de la mafia albanaise, toujours aidés par les Britanniques, qui cherchaient à tuer les sœurs du monastère de Devic  et  ont saccagé le monastère jusqu’à l’intervention des français :« Dans l’église , les icônes ont été lacérées, le signe de l’UCK gravé au couteau, la pierre tombale de Saint Joankije brisée. Le réfectoire  a été pillé : glacière, réfrigérateur, four électrique emportés. Dans le hangar, tracteurs et véhicules volés. Les vaches et le chien dérobés. Le père Séraphin qui officiait dans le monastère a été battu et obligé de transporter le blé, la farine  et les autres produits  vers la remorque, elle aussi ensuite volée. Les sœurs ont été menacées, humiliées, dépouillées de leurs objets personnels, de leurs montres et de leur linge. L’une d’elles aurait été violée » ([36]).

Au niveau politique, la Minuk (Mission des Nations Unis pour le Kosovo), mise en place à partir de 2001 et dont Bernard Kouchner est le haut représentant, est loin d’être objective. En effet,  Natasa Spanovic( présidente de la coordination des familles de disparus et tués en Ex Yougoslavie) nous rapporte qu’ « En 2006, 500 échantillons ont été détruits au Tribunal de la Haye. Des pièces à conviction, envoyées par la MINUK, au TPIY, montrant que des Albanais-et non des Serbes-avaient pratiqué des prises d’organes sur des prisonniers serbes et en avaient fait le commerce. De nombreuses organisations et personnes peuvent confirmer ce fait. Les institutions sont parfaitement au courant de ces terribles pratiques. Tout a été fait pour que la vérité soit étouffée ».

A ce sujet, le doute sur la duplicité de la Minuk s’est trouvé confirmé, a posteriori,  dans l’affaire de « la Maison Jaune ». Dans ce centre de détention clandestin découvert entre 2003 et 2004 dans le Sud du Kosovo, à proximité de la ville frontalière de Tropojë , la torture était monnaie courante et  le personnel de l’UCK y a pratiqué la vivisection sur des prisonniers, afin de leur enlever des organes dans le cadre d’un vaste trafic particulièrement repoussant.  Les preuves, étayées par les témoignages d’anciens de l’UCK dont l’un est cité dans le documentaire serbe « Anatomija Zlocina »(Anatomie d’un crime) sont des plus accablantes([37]). Mais, elles n’ont suscité qu’  « un rire gras, plein de mépris » de la part de Bernard Kouchner, quand il fut interviewé en 2004 sur cette affaire par des journalistes serbes de la RTS(Radio Télévision de Serbie). De plus, durant la guerre du Kosovo, les services secrets albanais auraient appuyé de manière logistique l’UCK, en facilitant l’implantation de plusieurs centres de ce type.  A côté de ce trafic particulièrement repoussant auquel l’UCK continue à se livrer, cette dernière a développé d’autres  trafics notamment de drogue et d’êtres humains. A destination de l’Europe de l’Ouest, ils sont gérés en grande partie par Xhavit Haliti(le bras droit de l’ancien Premier Ministre du Kosovo, Hashim Thaçi) et les différentes cellules de l’UCK à l’étranger, notamment en Suisse, qui font transiter  les drogues(cocaïne, héroïne, médicaments addictifs) par l’Allemagne et la République Tchèque, où le transport est géré par la mafia locale. La MINUK et les services occidentaux, notamment allemands, détiendraient des preuves accablantes sur Rrustem Mustapha(arrêté le 11 août 2002 par la MINUK pour trafics multiples ,chantage et instigations de violences) et  sur les frères Haradinaj qui étaient, à l’époque de la guerre, des responsables politico-militaires de l’UCK de premier plan, à la tête de la zone Dukagjini, frontalière avec celle de Drenica, gérée par Thaçi et consorts([38]).Elles auraient été fournies par Fatimir Limaj, ancien ministre des Transports du Kosovo, lors de son procès le 15 novembre 2004 pour crimes de  guerre, traitements cruels, actes inhumains et meurtres contre des Serbes et des Albanais, alors qu’il gérait le camp de Lapuchnik, charges desquelles il a été acquitté en septembre 2007([39]).

 Par rapport à ces affaires, il convient de citer l’entretien des plus révélateurs de Naim Miftari, ancien cadre de l’UCK devenu l’un des membres du SHIK(service de renseignement de la guérilla kosovare albanaise), avec Jean-Arnault Dérens, fondateur du Courrier des Balkans : «…  Deux pays étaient particulièrement bien informés et savaient tout ce qui se passait au Kosovo : la France et les Etats-Unis.[…]Au Kosovo, à l’été et à l’automne 1999,tout était possible, tous les crimes, toutes les vengeances, tous les trafics. Tout se déroulait presque au grand jour ». Ce dernier ajoute qu’ « en 1999, aucun crime ne pouvait être commis au Kosovo sans que Kouchner en soit informé (ce dernier était le représentant spécial du secrétaire général de l’ONU). Nos chefs sont des brigands qui ont détourné le sens de notre lutte, mais ils n’auraient pas pu commettre leurs forfaits sans la protection accordée par l’administration internationale, qui était pourtant là, en théorie, pour remettre de l’ordre au Kosovo([40]) ».

La Kosovo et l’UE : quelles perspectives pour cet Etat failli ???

Au vu de tous ces éléments, on est en droit de se demander si la République du Kosovo, indépendante depuis 2008, a sa place dans l’Union Européenne. Même si les responsables politiques du Kosovo cherchent à se donner une image plus acceptable, avec l’élection à la présidence de la République en 2011 de Mme Atifete Jahjaga(ancien officier général du SPK,Service de Police du Kosovo),force est de constater que Hashim Thaçi et ses proches font en sorte de garder le contrôle sur la vie politique du Kosovo. L’un d’entre eux, l’ancien ministre de la Défense, Agim Ceku a été inculpé et acquitté pour crimes de guerre, notamment pour ces actions en tant que colonel de la garde nationale croate et serait impliqué dans le massacre de Srebrenica. D’où les manifestations à Mitrovica en 2004 où des milliers d’Albanais Kosovars se sont livrés à des émeutes anti-serbes, appuyées clairement par l’UCK([41]). De nos jours, les agressions à l’encontre de Serbes ou d’Albanais opposés aux méthodes de l’UCK sont monnaie courante, notamment de la part de l’Unité d’opérations spéciales qui, en novembre 2013, aurait violenté des gardés à vue d’origine serbe([42]). De plus, les trafics ont pris une part notable dans l’économie du Kosovo, à tel point que les services policiers et douaniers de Serbie ont accentué leurs actions sur la frontière et se sont rapprochés du Service Fédéral de Lutte Anti-drogue russe(FSKN), avec lequel ils coopèrent depuis 2006.

Considérant tous ces faits, il est à craindre une facilitation de la circulation pour les trafiquants de toutes sortes dans le cas d’une adhésion de la Serbie à l’UE. Ces derniers  en profitent déjà, suite à l’intégration récente de la Croatie([43]). Cette situation ne peut être traitée à la légère et exige que les polices de l’UE collaborent de manière étroite avec les services de sécurité croates, serbes, macédoniens et bulgares sur la question. Cette coopération constituerait un cinglant démenti aux avis néo-conservateurs américains, qui considèrent que l’Europe n’est pas apte à sauvegarder sa stabilité, et permettrait de réaliser l’Europe de la Sécurité.



[1] http://www.lepoint.fr/monde/la-bosnie-divisee-commemore-l-attentat-de-sarajevo-28-06-2014-1841535_24.php La Bosnie, divisée, commémore l'attentat de Sarajevo-Le Point-28/06/2013.

[2] http://www.iris-france.org/docs/kfm_docs/docs/actu-europe/actu-euro-60-ue28-avec-la-croatie-quels-sont-les-chiffres-a-connatre.pdf  AVEC L’ADHÉSION DE LA CROATIE, QUELS SONT LES CHIFFRES À CONNAÎTRE

POUR L’UNION EUROPÉENNE À 28? PIERRE VERLUISE

[3] http://fr.ria.ru/world/20111209/192364322.html  L'UE reporte sa décision sur l'adhésion de la Serbie et du Monténégro-RIA Novosti.

[4]

[5] Zoran Milosevic, Unités d’intervention et forces d’opérations spéciales serbes :l’état des lieux, RAIDS n°256 de septembre 2007,pp 54-62

[7] Stefano Bianchini, La question yougoslave, Casterman Giunti,1996.

[8] Stefano Bianchini, La question yougoslave, Casterman Giunti,1996.

[9] Stefano Bianchini, La question yougoslave, Casterman Giunti,1996.

[10] Stefano Bianchini, La question yougoslave, Casterman Giunti,1996.

[11] Stefano Bianchini, La question yougoslave, Casterman Giunti,1996.

[12] Stefano Bianchini, La question yougoslave, Casterman Giunti,1996.

[13] Stefano Bianchini, La question yougoslave, Casterman Giunti,1996.

[14]La croix gammée et le turban  https://www.youtube.com/watch?v=mb4dj-yDej8

[15] Stefano Bianchini, La question yougoslave, Casterman Giunti,1996.

[17] Stefano Bianchini, La question yougoslave, Casterman Giunti,1996.

[19] Hors Série RAIDS N°49, les lances roquettes et les lances missiles au combat,pp 77. 

[20] https://www.youtube.com/watch?v=uJuWG6XQoTA Les Ch’tis d’Allah, le gang de Roubaix

[21] http://www.nytimes.com/2010/03/04/world/asia/04imam.html?_r=0 Former Pakistani Officer Embodies a Policy Puzzle-The New York Times.

[22] Pierre Péan, Kosovo, « une guerre juste » pour un Etat mafieux,Fayard,Paris,2013

[24] Pierre Péan, Kosovo, « une guerre juste » pour un Etat mafieux,Fayard,Paris,2013

[25] Pierre Péan, Kosovo, « une guerre juste » pour un Etat mafieux,Fayard,Paris,2013

[26] Jean Luc Marion,Le Figaro Magazine,13 février 2010

[27] Pierre Péan, Kosovo, « une guerre juste » pour un Etat mafieux,Fayard,Paris,2013

[28] Pierre Péan, « une guerre juste » pour un Etat mafieux, Fayard, Paris, 2013,pp 153

[29] Xavier Moreau,La nouvelle grande Russie, de l’effondrement de l’URSS au retour de Vladimir Poutine,Ellipses,2012.

[30] Pierre Péan, Kosovo, « une guerre juste » pour un Etat mafieux,Fayard,Paris,2013,p 107.

[31] Pierre Péan, Kosovo, « une guerre juste » pour un Etat mafieux,Fayard,Paris,2013,pp 182-190

[32] Xavier Moreau, La nouvelle grande Russie, de l’effondrement de l’URSS au retour de Vladimir Poutine,Ellipses,2012,pp 67-74.

[33] Pierre Péan, Kosovo, « une guerre juste » pour un Etat mafieux,Fayard,Paris,2013

[34] Pierre Péan, Kosovo, « une guerre juste » pour un Etat mafieux,Fayard,Paris,2013,pp 158-160

[35] Pierre Péan, Kosovo, « une guerre juste » pour un Etat mafieux,Fayard,Paris,2013,pp 205-218

[36] Pierre Péan, Kosovo, « une guerre juste » pour un Etat mafieux,Fayard,Paris,2013,pp 205-218

[37] Pierre Péan, Kosovo, « une guerre juste » pour un Etat mafieux,Fayard,Paris,2013

[38] ibid

[39] ibid

[40] Ibid

[41] Pierre Péan, Kosovo, « une guerre juste » pour un Etat mafieux,Fayard,Paris,2013

[42] Onze policiers accusés de » bavure », Police PRO N°44,p11

[43] Trafic d’armes pour le Soudan,POLICE PRO N°43, p.13



08/08/2014
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